Passionnée par les chansons de Noël, c’est armée de ma playlist la plus acérée que je vous livre, cette semaine, une déclaration d’amour aux hymnes 100% cloches qu'on ne s’autorise à écouter qu’en décembre (ou pas).
Il y a les passions de toujours et les passions qui voient le jour. Si j’ai appris les paroles de « Petit Papa Noël » en maternelle comme la majorité d’entre nous, je crois que mes compétences en matière de chansons de Noël sont restées vaines la majeure partie de ma vie. Nous n’avions pas forcément de cd ou vinyles du susdit thème dans la maison familiale, ce n’est donc pas une maladie génétique qui se transmettrait maladroitement de génération en génération.
Si aujourd’hui je suis pratiquement une spécialiste du genre, ça n’a donc pas toujours été le cas et mon souvenir le plus lointain d’obsession musicale remonte à décembre 2011, année où j’ai découvert la chanson « All I want for Christmas is you » à l’occasion d’une réédition de Mariah Carey en featuring avec Justin Bieber. Les adeptes de la diva en sueur devant mon affirmation puisque le titre original, succès désormais intemporel de la chanteuse aux 5 octaves, a été dévoilé pour la première fois en 1994. On pourrait dire que j’ai pris mon temps mais j’ai très bien rattrapé mon retard car depuis 12 ans, mon rituel le plus kitsch, c’est d’attribuer un « xmas tube » à chaque année qui passe. Ont succédé à la reprise du plus grand des classiques, « Last Christmas » de George Micheal, « Santa tell me » d’Ariana Grande, « Deck the Halls » version Glee ou encore « Shake up Christmas » du groupe Train , popularisée pour avoir été la bande son d’une pub Coca-Cola pour les fêtes de fin d’année. Je passe évidemment sur l’intégralité du répertoire Pentatonix, les albums iconiques de Michael Bublé, Sia et Kelly Clarkson, ou encore l’essai timide de Taylor Swift à qui « Santa Baby » seyait à merveille pendant sa période country.
Vous l’aurez compris, le répertoire étant très bien fourni, j’opte pour une tradition qui durera probablement toute ma vie, au grand damn de nombreuses personnes m’entourant qui n’ont jamais réellement compris pourquoi ce genre musical en particulier pouvait susciter chez moi, une émotion et un engouement qu’on ne lui aurait pas prêtés de façon évidente. C’est un fait, il existe 3 catégories de personnes face aux chansons de Noël : celles qui détestent, condamnant une mélodie parsemée de cloches insupportables ; celles qui n’ont pas d’avis et qui n’y prêtent pas spécialement attention ; et puis il y a les aficionados, ceux capables de performer dès les premières notes. Je me suis souvent demandée quelles raisons pouvaient nous pousser à faire partie malgré nous de l’une de ces trois catégories.
Plus jeune, j’avais écrit des articles basés sur des études loufoques qui vantaient l’impact positif des grelots en do mineur sur notre cerveau, ou bien tout l’inverse… leur impact négatif sur notre santé mentale en majeure partie déclenchée par l’exaspération et la sur-consommation non-désirée de ces musiques festives. Mais ce qu’en disent les psychologues qui ont le temps de se pencher sur ce genre de question dans un monde qui se casse littéralement la gueule… ne m’intéresse absolument pas. C’est dit. Je préfère, comme souvent, me fier à ma propre expérience et mes ressentis.
Voilà pourquoi, lorsque cette année j’ai ressenti le besoin de faire mon sapin aux alentours du 18 novembre, que j’ai glissé doucement vers le visionnage des téléfilms niais sur TF1 et que je trépignais d’impatience d’ouvrir ma playlist « Christmas » sur Spotify… j’ai tenté de comprendre pourquoi, plus que jamais, j’avais besoin de sauter tête la première dans ma tradition musicale de décembre qui commence dès le réveil avec des morceaux optimisés pour l’occasion. Oui, vous avez bien lu : je vais jusque’à les mettre en sonneries de réveils (il y en a 4, à intervalle de 5 minutes et rien n’est laissé au hasard). Traitez moi de zinzin si vous le souhaitez mais je mets ma main à couper que je me lève de meilleure humeur que vous (et c’est pas franchement gagné à la base des bases).
Forcément, il y a une explication. Avant tout, sachez que j’ai toujours aimé l’ambiance des fêtes de fin d’année. Depuis toute petite, c’est une période que j’affectionne particulièrement car je la trouve magique. Je ne cochais pas forcément toutes les cases du cliché, à savoir des tonnes de cadeaux, une seule et grande famille soudée ou bien la localisation géographique croulant sous la neige. Mais j’y trouvais tout de même mon compte. Les valeurs véhiculées aux alentours de Noël ont toujours touché ma corde sensible : partage, amour, reconnaissance, paillettes. Oui, c’est moi la meuf qui pleure devant l’épisode de “La Petite Maison de la Prairie” ou Laura vend son cheval qu’elle aime plus que tout pour offrir le chauffage à charbon hors de prix à sa mère, coiffant son père au poteau. Oui, c’est moi la meuf qui ai toujours reniflé devant l’adaptation Disney de « Un conte de Noël » de Dickens où l’on voit Mickey partager une minuscule dinde avec sa famille nombreuse, notamment un de ses fils condamnés à mourir d’une maladie s’il n’est pas soigné. Elle est peut-être là, la clé de ma passion pour les musiques de Noël : le paradoxe flagrant entre les tonalités festives et euphoriques et les paroles qui invitent à l’amour, aux retrouvailles, aux guérisons et à l’espoir.
J’ai grandi, et cette dualité entre la vraie vie de tous les jours et la magie de Noël s’est accrue aussi violemment que le nombre d’articles sur les punaises de lit en septembre dans la capitale.
Il n’y a pas de clochettes et de biscuits à la cannelle tous les matins dans la réalité. Il y a des peines, des épreuves et des mauvaises nouvelles. Alors d’accord, pas en permanence mais qui peut dire qu’il est réellement heureux tous les jours avec une vie entière à gérer et penser ? Mais quand Noël revient, la magie dont on a besoin lui colle le train arrière. Et je suis toujours prête à embarquer - à l’excès - pour souffler quelques semaines. C’est indéniable, les airs traditionnels sont pavés de bonnes intentions. « Rocking around the Christmas tree », « Sleigh ride » et « it’s the most wonderful time of the year » , volume maximum dans mes écouteurs, sont probablement en tête du classement. Leur rythme entrainant diminue largement mon taux de cortisol, l’hormone qui cause le stress (c’est prouvé, je vous raconte pas de salades), pour le plus grand bonheur des personnes habituées à me voir râler du matin au soir. Mais s’il peut y avoir un angle évident au style musical, il se veut pourtant un peu plus complexe lorsqu’on y prête une plus grande attention.
Parmi les chansons qui reviennent d’une année à l’autre, j’ai une affection particulière pour « Last Christmas » du groupe Wham, qui fêtera (déjà) son 40ème anniversaire en 2024. La chanson raconte l’histoire d’une personne ayant fait une déclaration d’amour à une autre sous le gui, près du sapin, bref à Noël. Plus de spoiler ici, l’élan de romantisme s’est mangé un mur. « And the very next day, you gave it away ». Ah la connasse, oserez-vous probablement penser à cet instant. Peut-être que George Michael, protagoniste principal au brushing discutable d’un clip d’anthologie, s’est un peu trop laissé emporter par la magie des fêtes de fin d’année. Peut-être qu’il y a cru. Peut-être que parfois nous-aussi. Et, durant une période ou l’amour est canonisé, quoi de plus triste que de se faire briser le coeur ? Pas grand chose je pense. Preuve est qu’il n’y a pas que des happy endings sous le sapin. Mais la suite des paroles invitent à nourrir l’autre sentiment dominant : l’espoir. « This year, to save me from tears, I gave it to someone special ». Bon, la vérité, c’est qu’on y croit pas trop parce que dès le début de la chanson, il claque un joyeux « I keep my distance but you still catch my eyes » qui est probablement la phrase qui admet que c’est un peu du pipo tout ça, parce qu’il n’a rien oublié le bougre. À noter que c’est ma phrase préférée de la chanson et que cette information est parfaitement inutile.
Il y a également la chanson « Christmas (Baby please come home) » qui date de 1963 et qui est un véritable hymne à la supplication de retour de l’être aimé. « They're singing "Deck the Halls », but it’s not like Christmas at all. I remember when you were here and all the fun we had last year ». Il semblerait que j’ai enfin mis le doigt sur la faille : il n’y a pas de bonheur excessif sans mélancolie ou nostalgie dans le tas. Ça ne rate jamais dans les textes : c’était toujours mieux avant.
Je raffole également tout particulièrement de l’hymne « Auld Lang Syne », que vous connaissez peut-être sous l’adaptation (à chier) « ce n’est qu’un au revoir » en français ou que les spécialistes de Sex and the City ont découvert dans le premier film de la franchise. Ce champ traditionnel écossais (les cornemuses, ma passion) de 1788 largement adapté et traduit dans le monde entier depuis, est un véritable hommage aux années qui passent et à l’amitié. À chaque fois que je l’écoute, je pleure doucement de reconnaissance parce que c’est l’émotion qu’il réveille chez moi. « Allez, une année de plus au compteur où tu t’en es sortie comme une cheffe, entourée par tout l’amour dont tu as besoin. Ni plus, ni moins ». Chacun sa prière. La mienne est ponctuée de notes et d’accords.
Voilà peut-être ce qui fait le charme de ces chansons à thème, le fait qu’elles soient capables de glisser d’une émotion à l’autre et qu’au milieu d’un excès de lumières, de cloches et de démonstration sentimentale, nous devions accepter la tristesse, les maux, la nostalgie qui finiront par être consolés, sans doute aucun. Ce qu’elles racontent est plus réaliste que ceux qui ne les écoutent pas vraiment pourraient le croire. Il y a peut-être la solitude, la nostalgie et certains regrets mais il y a surtout une porte grande ouverte sur cette envie de croire en plus grand et en plus beau, qui atteint son pic dans une période remplie de clichés. Parce qu’après tout, n’oublions pas que cette saison précède une nouvelle année. Et même si je ne suis pas très résolutions, je ne peux qu’admettre que c’est une nouvelle page blanche qu’on débute au 1er janvier. C’est finalement ça, la vraie magie de la fin d’année.
Après si vous préférez rester cantonnés sur « Mon beau sapin » en pensant que c’est juste une décla’ pour conifères, ça peut être tout aussi bien hein. Je vous souhaite juste que ce soit la version de l’orchestre philharmonique de Prague parce qu’elles fait sérieusement le taff.